mardi 13 juillet 2021

Tahiti et ses îles. Journal de bord Kava II. Mercredi 7 dimanche 11 juillet

Mercredi 7 
Trop beau pour être vrai. Les gréeurs sont là avant 10 h. Emilien et Emile de Fenua Rigging. Je les récupère sur la plage de la sympathique Salem Linda.  Très pro,  ils préparent rapidement le remplacement de l’axe cassé en mollissant les haubans pour basculer le mât. Les drisses de grand voile, de spi et la balancine sont frappées sur la poutre avant. Le génois est rapidement affalé. Tout se passe bien . Remplacer ce boulon va être un jeu d’enfant. Problème agaçant, le boulon ne passe pas. Mea culpa. J’ai mesuré un diamètre de 20. C’est du 19. Si je tenais l’ingénieur qui a choisi des boulons de 19....ca ne doit se voir que chez Jeanneau Lagoon un truc pareil. Les gréeurs sont « charrette » les deux prochains jours donc ne pourront revenir que samedi au mieux.  
Ils doivent partir s’occuper d’un autre bateau à  Taravao, Port Phaeton, entre Tahiti Nui et Tahiti Iti. La grande île et la presqu’île. Une voiture de loc y est disponible. Merci google. C’est déjà ça. Je grimpe dans leur camionnette, récupère la voiture. Aller retour express à Papeete pour y acheter les Saints boulons chez BVP (Boulonnerie Visserie de Polynésie). J’en prends plusieurs, de 18,  pas question de se faire avoir une seconde fois. Ca parait fluide comme ça mais entre l’oubli du masque, le téléphone déchargé, la charmante vendeuse « ouh mais on a surement pas ça en stock «  avec son accent chantant. Je n’y crois pas encore tout à fait quand je remonte dans la camionnette à 16 h. 
Comme dans tout bon épisode, la fin se passe bien. A 18 h je ramène nos sympathiques gréeurs à terre. 
Nous partirons demain jeudi ou vendredi matin. 
Sur les fichiers météo, le vent est un peu plus calme jeudi ; mais un peu mieux orienté vendredi. La mer est plus calme jeudi. Le vent sera plus fort dans la nuit de vendredi à samedi. Coline et Marius arrivent dimanche à Fakarava. Ces points de rendez vous multiples ne facilitent pas une navigation déjà bien compliquée. Les impératifs de date et de lieu sont les ennemis, les navigateurs le savent bien. Ils obligent à aller au mauvais endroit au mauvais moment. Il faut croire que je n’ai pas assez de mémoire, ou d’expérience; je m’étais juré qu’on ne m’y rependrait pas. 

Pendant ce temps, certains attrapent des poissons. Et ça ne leur prend pas longtemps ! Nous, on ne sait pas faire caramba

A bord, grosse activité de lecture



Jeudi 8
Moteur tribord  3714 h
Moteur babord 3765 h
Nouveau départ de l’îlot Nansouty à 8h45. 
Cap au 50 ; on va tenter Fakarava en profitant de la mer pas trop agitée. Le vent vient pile du 50. 13 noeuds environ   Plus dans le pif impossible. On ne hisse même pas la grand voile. Même aller sur Rangiroa à la voile est impossible. Donc pas très glorieux; ni très agréable. Les deux moteurs a 2000 tours et on progresse comme des fusées contre le vent à ... 4 noeuds. La vitesse d’une personne qui marche. Plus qu’à espérer que ça adonne, ou que la mer se calme. Pour l’instant c’est le shaker. 

Tahiti s’éloigne, très doucement. A droite Tahiti Nui, à gauche Tahiti Iti, la presqu’île. Entre les deux l’isthme avec Port Phaeton 

Vendredi 9 juillet
En mer
Vent Nord Est 12 à 16 noeuds qui ne se décide pas a prendre de l’Est. Donc bien de face. On a hissé la grand voile à un ris hier soir en croyant à une adonnante qui n’a duré que quelques minutes. Le ronron des deux moteurs à 2200 tours. Mer peu agitée mais bien secouante. 


Contrariété : l’écoute de foc est gréée n’importe comment. Les brins se croisent. Un détail mais dans le gros temps une écoute qui rague (frotte) peut casser. Et une baume sans écoute dans le gros temps c’est un vrai danger. L’effet papillon. 

A bord la position allongée domine. Certains ne la quitteront pas. 
Vers 10 h nous franchissons la moitié du parcours. 
A plus de 100 milles des côtes, je m’intéresse au fissures qui dessinent comme un pointillé tout -autour de la nacelle. J’espère que seul le gelcoat est atteint. 





Ne pas confondre fissure et cheveux. 

Belle après midi qui passe vite en jouant à la belote pour les pas malades. Capucine n’émerge pas de la cabine. Lise et Solene ne supportent d’être qu’allongées mais s’alimentent. Marco a des hauts et des bas. Il est bien aussi couché dans sa cabine. 
18 h. Avec la nuit, premier grain costaud, le vent forcit, on prend un 2ème ris. Tribord amure, au plus près du vent avec un appui moteur, on vise le milieu de Fakarava. 
Le moteur tribord cale. Tiens il nous avait déjà fait le coup à Moorea. Il redémarre. Ouf, avec un seul moteur, dans cette mer maintenant agitée, ce serait compliqué. 
Cale à nouveau deux heures plus tard. Et cette fois définitivement. Le vent a légèrement adonné. Sans repère , pas la moindre lune, au plus près tribord amure avec le seul moteur bâbord, tenir le cap est très compliqué. A la moindre faute d’attention, le bateau vire de bord, le foc se borde à contre...pas fun. Je descends me reposer à 4 h, bien rincé. Dans la cabine c’est relativement;t calme.  Je remonte à 7h pour un problème d’affichage des instruments. En mode nuit, ils n’affichent plus rien le jour levé. Nous avons beaucoup abattu, c’est à dire que nous avons fait une route moins serrée au vent et nous allons maintenant rater l’abri de Fakarava. En profitant d’une mer plus plate sous l’abri de l’ile, j’espérais atteindre la passe avec un seul moteur. 
Je contacte Bertrand de Tyc par l’iridium. Pour lui le problème vient de l’alimentation en gasoil. J’avais peur qu’on ait grillé un joint de culasse. Ca me rappelle des souvenirs. Un problème d’algues dans le gasoil qui nous avait bien embêté pendant notre navigation dans les Caraïbes. Je m’attaque au problème. Recroquevillé dans la cale moteur, par mer forte, face aux vagues,  je démonte et nettoie le préfiltre, change le filtre à gasoil, souffle dans les durites,  desserre les injecteurs, tente de réamorcer. Une vraie partie de plaisir. Sans succès. 

La navigation de plaisance. Chaque grain c’est la douche immédiate, à l’horizontale. 


Pour l’instant, nous ne sommes plus qu’à 20 milles de Faka, mais on fait cap sur Kauehi, plus à l’ouest. C’est rageant. Et là bas, pas de dépannage possible du moteur. J’ai un gros doute sur la bonne décision à prendre. Continuer à moins de deux noeuds sur le fond en direction de Faka? Abattre et naviguer avec une allure correcte à la voile vers Kauehi ?  J’air peur d’avoir le même problème, de ne pas pouvoir remonter sa côte nord au près jusqu’à la passe. Faire demi tour et repartir au portant vers Tahiti ? l’équipage est bien atteint et si je leur annonce une nouvelle nuit en mer...je n’ose pas imaginer. 
Theo arrive à nous préparer un plat de semoule qui tombe bien. Nous n’avons pas vraiment mangé depuis hier à midi. Il nous reste 4 heures pour atteindre la passe. La marée haute est à 16 heures. Quand la marée descend, le lagon se vide par la passe. Le courant sera difficile à franchir sur un seul moteur. Nous virons de bord. bâbord amure notre cap est plein sud mais nous nous rapprochons de la protection de Fakarava. Et plan B pour le moteur, la durite d’alimentation directement dans le bidon de diesel de secours. Hector aux commandes des gazs, moi dans la cale. Enfin ca redémarre. Un dernier virement de bord, un cap tenu au cordeau par Gaston, un petit appui deux moteurs et quand nous sommes protégés par l’atoll, tout change. Même si le moteur tribord cale à nouveau, le bateau est maintenant facilement manoeuvrable avec un seul moteur dans une mer calmée. Evidemment le dernier d’une série de grains s’évacue et le soleil réapparait. Un thon mord et déroule toute la ligne juste avant la passe. Hector est bien déçu de le voir s’échapper alors qu’il l’avait amené juste derrière le bateau. Pas moi, je suis tellement soulagé d’entrer dans le lagon que je suis presque heureux de laisser la vie à ce thon. 
Une heure après nous sommes au mouillage, au coucher du soleil, devant le village de Rotoava. Difficile d’imaginer dans cette quiétude notre situation quelques heures auparavant. 

Samedi 10
Remise en état du bateau, wingfoil, accueil des derniers membres de l’équipage, fête d’accueil des jeux inter-iles. 
Je ne comprenais pas pourquoi cette latte faisait un angle bizarre au guindant.   Elle est trop courte. 

Un boitier de latte cassé et un gousset de latte à recoudre. 

Ca, ca fait plaisir, une écoute remise dans le bon sens 



Quand on commence à douter du bateau, on peut trouver les liaisons à la mèche de safran bien rouillées. 




























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